Dans la proximité des Grands

Donneau de Visé est issu des milieux proches de la cour. Il descend d’une famille de militaires pourvus de charge : son grand-père est sommelier d’échansonnerie, son frère, porte-manteau de la reine. L’un de ses neveux, Louis, aura pour parrain Louis XIV lui-même. … Son père, Antoine Donneau de Visé, militaire également, épouse Claude Gaboury, fille de Jean Gaboury, à la fois tapissier et “garde meuble des meubles meublants pour les ambassadeurs” jusqu’à sa mort en 1659. Antoine Donneau hérite à ce moment-là de la charge de “garde-meubles de la maison du Roi, des princes étrangers et ambassadeurs extraordinaires” et l’exerce, vraisemblablement, en survivance avec son fils. C’est donc pourvu de ce statut que Donneau de Visé existe, en premier lieu, à la cour. Au début des années 1660, cette charge lui rapporte 600 livres par mois. La carrière littéraire lui permettra de toucher plus de 15000 livres par an.

Bien que n’étant pas issue d’une famille gravitant dans l’environnement de la cour, Mademoiselle Desjardins, parvient rapidement à se mettre dans les bonnes grâces de personnalités influentes (Madame de Chevreuse, Mademoiselle de Montausier, la duchesse Mazarin). Elle obtiendra finalement une pension royale pour ses écrits, gratification rarement accordée à une femme.

Charlotte de Brégy est fille d'un secrétaire de Gaston d'Orléans et d'une femme de chambre de la reine. Le succès dans les milieux mondains de ses pièces galantes lui font connaître une ascension sociale remarquable. Proche de la reine et de Mazarin elle devient l'une des femmes les plus en vues de la Cour dans les années 1650-1660.

Edmé Boursault descend, comme Donneau de Visé, d’une famille de militaires. Soutenu par Pellisson à son arrivée à Paris, il est secrétaire de la duchesse d’Angoulême en 1660, ce qui lui permet de lancer, dès cette époque, une gazette hebdomadaire et de recevoir, en 1662, une pension royale de 2000 livres qu’il perdra rapidement. Cette même année, il obtient une charge de receveur des tailles à Montluçon, source de revenus financiers confortables.

Molière enfin présente un profil à bien des égards similaire : son père Jean Poquelin a acquis en 1631 la charge de valet de chambre et tapissier du roi, que le comédien exerce en survivance avec lui de 1637 à 1643 pour 300 livres par an. Le fils Poquelin se démet de cette charge pour se lancer dans le théâtre, mais la récupère en 1660, au décès de son frère, et la conserve jusqu’à sa mort, tout en exerçant une activité théâtrale extrêmement rémunératrice, élaborée en fonction du goût de la cour. La troupe de Molière accède au statut de troupe royale en 1665, et l’auteur lui-même reçoit une pension de “bel esprit” à partir de 1663.

D'origines partiellement différentes, ces "professionnels des lettres" ont en commun des parcours identiques : évoluant dans l’entourage de la Cour, ils parviennent à atteindre des situations de fortunes intéressantes, voire extraordinaires, par le biais des créations littéraires qu’ils proposent à ce public. Cette ascension fulgurante que Molière connaît en précurseur indique combien la carrière des lettres qu’embrasse Jean Donneau de Visé est désormais l’un des “moyens de parvenir” dans le second XVIIe siècle.

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